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1451

Il y près d'un an, j'avais publié une note intitulée de manière un peu amphigourique "18739".

 

Ce titre faisait référence au numéro de dossard que je ne porterais pas lors du marathon de Paris pour lequel je me préparais activement lorsque Dame Santé émit un avis contraire, le 5 février 2006. Ce fut un moment difficile et plus encore le furent les mois qui suivirent, pendant lesquels je ne fis pas le moindre footing, activité que je pratiquais régulièrement depuis 13 ans, ayant même contracté rapidement le virus de la compétition, à plus de 40 ans.

Oh, vous n'avez jamais lu mon nom dans "L'Équipe" ni vu mon visage à Stade 2. L'un des avantages de la course sur route (ou de la course nature) est que l'on mélange les sportifs du dimanche et les athlètes de haut niveau, les jeunes et les vieux, les femmes et les hommes sans aucun problème de cohabitation.

Si ces mois furent difficiles, j'appris cependant rapidement à relativiser, mes activités professionnelles de l'époque m'ayant amené à côtoyer des personnes endurant des souffrances bien pires que les miennes, avec une dignité et un courage exemplaires.

Debut septembre, le spécialiste en médecine que je voyais pour la deuxième fois m'autorisa à reprendre tranquillement le footing avec des précautions, ce que je fis dès le lendemain, veille de mon anniversaire. 6 kilomètres, il faisait chaud, j'avais quelques kilos en plus et du souffle en moins, mais la souffrance donna naissance à un réel plaisir. J'ai continué ainsi, sans forcer, allongeant progressivement les distances, sans pour autant pouvoir me présenter au départ d'une course pour laquelle un certificat médical est légalement obligatoire.

Ce précieux sésame me fut enfin donné le 19 mars dernier par mon cardiologue après une dernière visite chez le spécialiste. Je pourrais donc "Courir pour la Vie" le 1er avril! Quasiment devant ma porte, dans des rues dont je connais le moindre pavé, la moindre ornière.

Je suis donc allé m'inscrire sur le 10km (raisonnable, toujours) au secrétariat du C.O.C.A.A. où l'on me remit mon dossard: le 1451 (d'où le titre de cette note, mais vous l'aviez déjà compris). medium_DSC00612.JPGJ'allais enfin pouvoir ressortir mes épingles de nourrice pour fixer ce dossard à mon maillot. 427 jours après ma dernière compétition (un championnat régional de cross country); 506 jours après ma dernière course sur route (7km un 11 novembre); 553 jours après mon dernier 10km. Une éternité, à mon âge. Mais qu'importe, la vie était belle!

Elle l'était d'autant plus que le même soir, lors d'un footing un peu plus poussé, je pus vérifier que j'étais capable de tenir 10 kilomètres en moins de 48 minutes sans me faire mal.

Le lendemain, elle l'était un peu moins. Je n'avais pas eu un rhume depuis plus d'un an et, juste au mauvais moment, les microbes m'envahissaient de manière méchante. Pendant 48 heures, je n'étais pas très optimiste pour ma participation à la course du dimanche. Mais samedi matin, j'avais mieux dormi, les jambes n'étais pas molles et comme de toute façon on ne respire pas avec le nez en courant… Même constat dimanche matin.

J'allais donc partir avec l'objectif que je m'étais fixé: finir entre 47'30 et 48'00". Mieux peut-être,  un peu moins bien plus vraisemblablement compte tenu de l'état de santé, mais de toute façon, en étant raisonnable. À titre de comparaison, en 2004, sur ce même parcours (à quelques détails près pour cause de travaux), j'avais réussi 39'27", temps que j'aurais encore pu réaliser au printemps 2006 si…

Entre temps, 7 mois d'inactivité totale, et puis un entraînement fondé sur une certaine qualité (adaptée aux compétitions et aux objectifs) remplacé par une addition de séances de foting à un rythme plus "pépère". Et je n'oublie pas que la nature a laissé quelques traces et fait quelques dégâts dans mon organisme. Et qui veut courir longtemps ménage ses guiboles…

Dimanche 1er avril, 13h00, c'est l'heure de l'échauffement (léger compte tenu des objectifs modestes). Je choisis plutôt de me rendre sur les berges du canal tout proche plutôt que sur le parcours macadamisé que je connais par cœur. 2O minutes de footing tranquille et, après avoir enfilé mon débardeur, je me dirige doucement vers le départ situé à quelques hectomètres de chez moi.

Je retrouve des visages amis: Christian, Elena, Marc, Bruno et quelques autres. Une préoccupation, ne pas partir trop vite: entre 4'45" et 4'50" au kilomètre, plus vite je ne tiendrais pas. Et je veux surtout finir plus vite que je ne commencerai. 24 minutes pour la première boucle de 5 kilomètres, ce serait parfait.

13h45. Départ dans 5 minutes. Tiens le soleil perce enfin définitivement la brume qui traînait depuis le matin, C'est bien pour les spectateurs, un peu moins pour les coureurs (surtout pour les semi-marathoniens qui s'élanceront à 15h30).

Encore quelques poignées de mains, et le pistolet claque. C'est la ruée. Plus de 800 personnes au départ, il faut se méfier, il y toujours des inconscients, placés sur les premières lignes depuis ½ heure, qui vont partir comme des escargots endormis au risque de provoquer un chute. D'ailleurs la chute intervient au bout de 30 mètres. Bernard, un ami rémois (qui me devançait toujours de quelques poignées de secondes les années précédentes) en est la victime avec un militaire. Mais tous deux se relèvent et finiront à une place honorable.

Au bout de 400 mètres environ, on peut courir enfin de manière plus décontractée. Les espaces se créent, et c'est tant mieux car c'est le premier virage, près de la prison. J'ai l'impression de ne pas aller vite, je ne force pas. Il faut attendre le panneau "KM 1" pour savoir mais, à medium_d539re2.jpgmon avis, c'est bon. Surprise, je passe en 4'26", c'est trop vite pour moi (et encore, il faut retrancher à ce temps les quelques secondes nécessaires pour franchir la ligne de départ). Je ralentis donc, du moins le crois-je car la deuxième "borne" est effectuée en 4'18". J'ai vraiment tout faux, d'autant que je sens que ma respiration est loin d'être optimale (maudite rhino-pharyngite!), les poumons semblent rétrécis.

D'un seul coup, le pessimisme m'envahit, je dois absolument trouver le bon rythme, revenir au-dessus de 4'45", sous peine de souffrir sur la fin. 4'36" pour le troisième kilomètre, encore trop vite. Quelques spectateurs me reconnaissent et m'encouragent par mon prénom ou mon nom. Et j'aperçois JaPal qui doit lire la préoccupation sur mon visage. Voici la rue de la Marne, en léger faux-plat montant, de nouveau empruntée avec son beau  revêtement pavé (un pavé régulier, rien à voir avec Paris-Roubaix). 4ème kilomètre en 4'39" et je sens que les jambes tournent moins bien, j'ai chaud, la tête est envahie de pensées négatives. Ma compétition commence. La lutte contre le doute. Je suis largement en avance sur mon objectif (22'46") à la mi-course mais je sais que je vais souffrir.

C'est la seconde moitié, les rues empruntées un peu plus tôt s'offrent encore à mes semelles mais le parcours semble plus difficile. Et je vois de plus en plus de concurrents me dépasser, à commencer par Céline, la jeune fille d'un ami coureur. Rien de grave, je suis encore en avance. Il faut simplement tenir à un peu moins de 5 minutes au kilomètre. J'y parviens aux sixième et septième.

Le suivant est parcouru en 5'06". Et pourtant, je n'ai pas vraiment mal aux jambes, les poumons et le cœur ne donnent pas de signe alarmant. Non, simplement moins d'envie, moins de motivation et surtout moins d'énergie, moins de carburant. La cadence de mes foulées s'est adaptée à mes capacités du moment. Il me reste un peu plus de 10 minutes pour rester dans mon objectif. Tout va bien mais j'ai du mal à m'en convaincre!

Début du neuvième kilomètre, je repasse devant JaPAl qui doit me voir grimacer et qui a constaté que des coureurs que je précédais au premier tour sont maintenant devant moi… Revoici la rue de la Marne dont la pente paraît plus forte. 5'09" pour ce kilomètre. Et c'est le début du dernier, le panneau est devant l'entrée du Centre Financier de La Poste… Deux ou trois virages, une jeune Rémoise me dépasse, je reviens à sa hauteur pendant quelques dizaines de mètres puis la laisse filer au moment ou un concurrent venu de l'arrière relance l'allure.

Ça y est! Enfin la dernière ligne droite! Le portique d'arrivée et le chrono sont en vue. Je remets en route la machine fatiguée et dépasse 2 ou 3 compagnons de souffrance. La ligne est franchie en 47'38". C'est le temps que j'espérais, et pourtant je n'ai pas le sourire attendu en franchissant la ligne, j'ai l'impression d'avoir couru "à l'envers". Au lieu de partir tranquillement et de finir "facile" mais plus vite, j'ai fait tout le medium_6595re2.jpgcontraire.

C'est la restitution du dossard (avec puce électronique intégrée). En échange, le traditonnel tee-shirt et le sachet de ravitaillement aux couleurs d'une banque qui se dit pleine de bon sens. À la sortie du sas je retrouve JaPal avec qui j'échange les premières impressions. Elle est rassurée de me voir à peu près en bon état car elle avait nettement perçu ma baisse de régime entre les deux tours.

Maintenant, retour at home pour la douche. Nous croisons la longue file des concurrents (parmi lesquels Madame et Monsieur "Landolina") qui continuent leur procession vers l'arrivée, leur prodiguant quelques encouragements. Je me dis que beaucoup souffrent plus que moi et, redevenu spectateur, je me sens admiratif…

Le bilan? Au-delà des chiffres et d'un anecdotique classement (320ème sur 793 classés au "scratch", comme on dit), il me reste le plaisir de m'être retrouvé au milieu d'un peloton, d'être allé jusqu'au bout et d'avoir atteint mon objectif. Et puis, même si je sais que j'ai mal couru, j'ai pu me rendre compte (sur les premiers kilomètres) que je serais sans doute capable de faire mieux la prochaine fois, avec un entraînement adapté. Qui sait? Peut-être 45'00" le 9 juin pour le 10 bornes de l'A.S.P.T.T. Châlons? C'est le défi que je me lance!

 À suivre…

Commentaires

  • Bonjour,
    Je te félicite. J'ai lâché le sport en 1972 malheureusement.
    J'avais de bons résultats en course (toujours 2ème). J'aurais dû continuer.
    Je sais qu'il n'est pas trop tard mais qu'il faut y aller progressivement. Peut être dans quelques années, je m'entraînerai.
    Je t'envie.... c'est pas mal de discipline pour arriver à ce résultat.

  • OK pour le nouveau défi... mais gaffe quand même, frangin !
    Et merci pour ce compte rendu détaillé !
    Bon, je boucle les bagages et nous filons du côté de chez les parfumeurs !!!
    @+

  • En tout cas une belle performance et un bon texte. Avec le récit, on est en plein dedans.

  • Encore bravo pour cette reprise le père! Moi je n'en ferais plus autant! Comme lors d'une ancienne édition,où nous avions lutté ensemble (enfin surtout moi je crois ;-)).
    Donc bon courage pour la suite de tes péripéties et je suis sûre qu'avec ton physique et ton mental d'athlète, tu vas rapidement et allègrement descendre sous la barre des 45 minutes...

  • Merci ma Fillotte. Mais c'est de plus en plus dur avec l'âge...

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