Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Sport

  • Merci Bernard

    Ou tout ce que l'on ne vous a pas dit sur la coupe du monde de rugby

    c10836c36bba46689a98b79fad3caf4d.jpg

    Depuis bien avant le 7 septembre, date de la défaite de l'équipe de France contre l'Argentine, on nous rebat les oreilles avec ce grand évènement. On a voulu nous faire croire que "nous" allions être champions du monde, que nous étions les plus beaux, que nous avions le meilleur coach, etc... On était loin de 1998 et de la coupe du monde de football où chacun tapait à qui mieux mieux sur "Mémé" Jacquet et son équipe...

    Nous allions commencer par écraser les Pumas et la route vers la finale contre les All Blacks serait grande ouverte... Quelques amateurs un peu éclairés ont bien tenté de faire entendre leur voix pour dire que tout ne serait pas si simple, que l'Argentine nous battait régulièrement, mais en vain...

    Je ne vais pas vous raconter la compétition, l'overdose est déjà là! Simplement, je vais vous parler de "ma" coupe du monde de rugby.

    Tout d'abord, il convient de redonner à l'évènement sa juste valeur. Le rugby n'est qu'un sport régional. Faites le compte: les 3 grands de l'hémisphère Sud auxquels on ajoutera l'Argentine (et en Argentine, le rugby est loin derrière d'autres sports), les îles britanniques qui arrivent à faire 4 équipes avec 2 états, la France (enfin, un quart de la France), l'Italie (à peine), quelques archipels polynésiens et l'on a fait le tour du monde. Les autres sont à peu près au niveau du Luxembourg ou des îles Feroë en football.

    En matière de sports collectifs, le rugby est donc loin (sans parler du football) derrière le basket-ball, le handball ou le volley-ball.

    Les matches? Soit il s'agissait de mascarades, tellement les affiches étaient déséquilibrées, soit il s'agissait de "combats entre hommes", comme se plaisaient à le souligner les commentateurs pour bien nous faire comprendre que nous n'étions que des béotiens s'il nous advenait de nous ennuyer devant les téléviseurs.

    L'équipe de France? Elle a été à l'image de son coach: sans imagination, se contentant de décliner les consignes sans comprendre qu'en sport comme ailleurs ce ne sont pas les systèmes qui font les hommes mais les hommes qui font les systèmes. Bien sûr, comme chacun, je me suis réjoui de la victoire contre la Nouvelle-Zélande (je n'ai regardé que les dernières minutes), oubliant que l'arbitre (Anglais, donc qui pouvait choisir l'adversaire de son équipe pour les demi-finales) avait oublié de siffler 3 fautes contre la France en fin de match (2 pénalités et l'en-avant précédant l'essai victorieux).

    Mais je me suis presque réjoui de la défaite contre nos ennemis favoris. Cette équipe-là, refusant le jeu, ne méritait pas d'aller plus loin (l'Angleterre non plus, c'est vrai). Et ce soir-là, j'ai eu envie de crier "Merci Bernard". Grâce à toi, la défaite n'a pas été triste.

    Sans doute pensez-vous que je n'aime pas le rugby? Eh bien c'est une erreur, c'est justement parce que j'aime ce sport que j'ai eu envie d'écrire ces quelques lignes. Bien sûr, je suis Lorrain, donc je ne peux rien connaître au rugby. Mais la ville où j'ai vécu ma jeunesse était une ville de garnison et beaucoup de militaires venaient du Sud-Ouest. Il y avait donc à Verdun une bonne équipe de rugby, à l'accent chantant (troisième division nationale de l'époque). Cette équipe a même formé un futur international (Meusien de pure souche), Michel Vannier dit "Brin d'Osier" qui joua arrière de l'équipe de France à la charnière des années 50 et 60 (malheureusement, il fut cassé par les Springboks lors d'une tournée en 1958). Très rapide, excellent buteur, il fut longtemps le meilleur réalisateur de l'équipe de France avant d'être détrôné par Thierry Lacroix. Il faut noter qu'il était très critiqué en France et très apprécié par les Anglais!

    J'ai donc souvent assisté à des matches de rugby avec mes parents et il m'est même arrivé d'y jouer au lycée (car les profs d'EPS venaient aussi du Sud Ouest).

    Et puis, il y a des choses bien au rugby. Si tous les supporters, de tous les sports, pouvaient avoir le même comportement, avant, pendant et après les matches, que la vie serait belle!

    Les joueurs, j'ai quand même été triste pour eux car, et je ne discute pas le choix des personnes faits par notre futur (peut-être, puisque maintenant on l'accuse d'indélicatesse à l'égard du fisc) secrétaire d'État, ils se sont bien battus. Mais on les sentait malheureux. Malheureux d'être prisonniers d'une tactique qui ne correspondait pas à leur talent. Malheureux comme Michalak parce qu'on lui répétait qu'il n'avait pas de jeu au pied, malheureux comme Bauxis qui n'avait pas le droit de faire autre chose que de balancer des grands coups de pied, malheureux comme Chabal parce que son coach le déteste (c'est Bachelot qui le dit) et que seule la vox populi l'avait imposé, malheureux comme ceux qui regardaient les matches importants des tribunes parce qu'ils ne jouaient pas au Stade Français, malheureux comme ils l'ont tous été quand ils ont senti leur rêve s'évanouir.

    Et moi, j'étais malheureux parce que je pensais à ceux qui m'avaient fait rêver autrefois: les Boniface, Albaladejo, Darrouy, Danos, Dourthe, Spanghero, Rives, Villepreux, Cantoni, Paparemborde, Bastiat, Sallefranque et tant d'autres... Artistes ou combattants à qui l'on donnait le droit à l'erreur parce qu'on leur demandait d'oser, et qu'ils réussissaient souvent... Ils n'étaient après tout que des hommes, avec leurs qualités et leurs défauts, mais ils s'amusaient sur le terrain, ils prenaient du plaisir et en donnaient, sans calculer, même dans la douleur... et Roger Couderc faisait le reste...

    Alors, ce soir, je leur dis: "Allez, les Petits!"

     

     

  • 1451

    Il y près d'un an, j'avais publié une note intitulée de manière un peu amphigourique "18739".

     

    Ce titre faisait référence au numéro de dossard que je ne porterais pas lors du marathon de Paris pour lequel je me préparais activement lorsque Dame Santé émit un avis contraire, le 5 février 2006. Ce fut un moment difficile et plus encore le furent les mois qui suivirent, pendant lesquels je ne fis pas le moindre footing, activité que je pratiquais régulièrement depuis 13 ans, ayant même contracté rapidement le virus de la compétition, à plus de 40 ans.

    Oh, vous n'avez jamais lu mon nom dans "L'Équipe" ni vu mon visage à Stade 2. L'un des avantages de la course sur route (ou de la course nature) est que l'on mélange les sportifs du dimanche et les athlètes de haut niveau, les jeunes et les vieux, les femmes et les hommes sans aucun problème de cohabitation.

    Si ces mois furent difficiles, j'appris cependant rapidement à relativiser, mes activités professionnelles de l'époque m'ayant amené à côtoyer des personnes endurant des souffrances bien pires que les miennes, avec une dignité et un courage exemplaires.

    Debut septembre, le spécialiste en médecine que je voyais pour la deuxième fois m'autorisa à reprendre tranquillement le footing avec des précautions, ce que je fis dès le lendemain, veille de mon anniversaire. 6 kilomètres, il faisait chaud, j'avais quelques kilos en plus et du souffle en moins, mais la souffrance donna naissance à un réel plaisir. J'ai continué ainsi, sans forcer, allongeant progressivement les distances, sans pour autant pouvoir me présenter au départ d'une course pour laquelle un certificat médical est légalement obligatoire.

    Ce précieux sésame me fut enfin donné le 19 mars dernier par mon cardiologue après une dernière visite chez le spécialiste. Je pourrais donc "Courir pour la Vie" le 1er avril! Quasiment devant ma porte, dans des rues dont je connais le moindre pavé, la moindre ornière.

    Je suis donc allé m'inscrire sur le 10km (raisonnable, toujours) au secrétariat du C.O.C.A.A. où l'on me remit mon dossard: le 1451 (d'où le titre de cette note, mais vous l'aviez déjà compris). medium_DSC00612.JPGJ'allais enfin pouvoir ressortir mes épingles de nourrice pour fixer ce dossard à mon maillot. 427 jours après ma dernière compétition (un championnat régional de cross country); 506 jours après ma dernière course sur route (7km un 11 novembre); 553 jours après mon dernier 10km. Une éternité, à mon âge. Mais qu'importe, la vie était belle!

    Elle l'était d'autant plus que le même soir, lors d'un footing un peu plus poussé, je pus vérifier que j'étais capable de tenir 10 kilomètres en moins de 48 minutes sans me faire mal.

    Le lendemain, elle l'était un peu moins. Je n'avais pas eu un rhume depuis plus d'un an et, juste au mauvais moment, les microbes m'envahissaient de manière méchante. Pendant 48 heures, je n'étais pas très optimiste pour ma participation à la course du dimanche. Mais samedi matin, j'avais mieux dormi, les jambes n'étais pas molles et comme de toute façon on ne respire pas avec le nez en courant… Même constat dimanche matin.

    J'allais donc partir avec l'objectif que je m'étais fixé: finir entre 47'30 et 48'00". Mieux peut-être,  un peu moins bien plus vraisemblablement compte tenu de l'état de santé, mais de toute façon, en étant raisonnable. À titre de comparaison, en 2004, sur ce même parcours (à quelques détails près pour cause de travaux), j'avais réussi 39'27", temps que j'aurais encore pu réaliser au printemps 2006 si…

    Entre temps, 7 mois d'inactivité totale, et puis un entraînement fondé sur une certaine qualité (adaptée aux compétitions et aux objectifs) remplacé par une addition de séances de foting à un rythme plus "pépère". Et je n'oublie pas que la nature a laissé quelques traces et fait quelques dégâts dans mon organisme. Et qui veut courir longtemps ménage ses guiboles…

    Dimanche 1er avril, 13h00, c'est l'heure de l'échauffement (léger compte tenu des objectifs modestes). Je choisis plutôt de me rendre sur les berges du canal tout proche plutôt que sur le parcours macadamisé que je connais par cœur. 2O minutes de footing tranquille et, après avoir enfilé mon débardeur, je me dirige doucement vers le départ situé à quelques hectomètres de chez moi.

    Je retrouve des visages amis: Christian, Elena, Marc, Bruno et quelques autres. Une préoccupation, ne pas partir trop vite: entre 4'45" et 4'50" au kilomètre, plus vite je ne tiendrais pas. Et je veux surtout finir plus vite que je ne commencerai. 24 minutes pour la première boucle de 5 kilomètres, ce serait parfait.

    13h45. Départ dans 5 minutes. Tiens le soleil perce enfin définitivement la brume qui traînait depuis le matin, C'est bien pour les spectateurs, un peu moins pour les coureurs (surtout pour les semi-marathoniens qui s'élanceront à 15h30).

    Encore quelques poignées de mains, et le pistolet claque. C'est la ruée. Plus de 800 personnes au départ, il faut se méfier, il y toujours des inconscients, placés sur les premières lignes depuis ½ heure, qui vont partir comme des escargots endormis au risque de provoquer un chute. D'ailleurs la chute intervient au bout de 30 mètres. Bernard, un ami rémois (qui me devançait toujours de quelques poignées de secondes les années précédentes) en est la victime avec un militaire. Mais tous deux se relèvent et finiront à une place honorable.

    Au bout de 400 mètres environ, on peut courir enfin de manière plus décontractée. Les espaces se créent, et c'est tant mieux car c'est le premier virage, près de la prison. J'ai l'impression de ne pas aller vite, je ne force pas. Il faut attendre le panneau "KM 1" pour savoir mais, à medium_d539re2.jpgmon avis, c'est bon. Surprise, je passe en 4'26", c'est trop vite pour moi (et encore, il faut retrancher à ce temps les quelques secondes nécessaires pour franchir la ligne de départ). Je ralentis donc, du moins le crois-je car la deuxième "borne" est effectuée en 4'18". J'ai vraiment tout faux, d'autant que je sens que ma respiration est loin d'être optimale (maudite rhino-pharyngite!), les poumons semblent rétrécis.

    D'un seul coup, le pessimisme m'envahit, je dois absolument trouver le bon rythme, revenir au-dessus de 4'45", sous peine de souffrir sur la fin. 4'36" pour le troisième kilomètre, encore trop vite. Quelques spectateurs me reconnaissent et m'encouragent par mon prénom ou mon nom. Et j'aperçois JaPal qui doit lire la préoccupation sur mon visage. Voici la rue de la Marne, en léger faux-plat montant, de nouveau empruntée avec son beau  revêtement pavé (un pavé régulier, rien à voir avec Paris-Roubaix). 4ème kilomètre en 4'39" et je sens que les jambes tournent moins bien, j'ai chaud, la tête est envahie de pensées négatives. Ma compétition commence. La lutte contre le doute. Je suis largement en avance sur mon objectif (22'46") à la mi-course mais je sais que je vais souffrir.

    C'est la seconde moitié, les rues empruntées un peu plus tôt s'offrent encore à mes semelles mais le parcours semble plus difficile. Et je vois de plus en plus de concurrents me dépasser, à commencer par Céline, la jeune fille d'un ami coureur. Rien de grave, je suis encore en avance. Il faut simplement tenir à un peu moins de 5 minutes au kilomètre. J'y parviens aux sixième et septième.

    Le suivant est parcouru en 5'06". Et pourtant, je n'ai pas vraiment mal aux jambes, les poumons et le cœur ne donnent pas de signe alarmant. Non, simplement moins d'envie, moins de motivation et surtout moins d'énergie, moins de carburant. La cadence de mes foulées s'est adaptée à mes capacités du moment. Il me reste un peu plus de 10 minutes pour rester dans mon objectif. Tout va bien mais j'ai du mal à m'en convaincre!

    Début du neuvième kilomètre, je repasse devant JaPAl qui doit me voir grimacer et qui a constaté que des coureurs que je précédais au premier tour sont maintenant devant moi… Revoici la rue de la Marne dont la pente paraît plus forte. 5'09" pour ce kilomètre. Et c'est le début du dernier, le panneau est devant l'entrée du Centre Financier de La Poste… Deux ou trois virages, une jeune Rémoise me dépasse, je reviens à sa hauteur pendant quelques dizaines de mètres puis la laisse filer au moment ou un concurrent venu de l'arrière relance l'allure.

    Ça y est! Enfin la dernière ligne droite! Le portique d'arrivée et le chrono sont en vue. Je remets en route la machine fatiguée et dépasse 2 ou 3 compagnons de souffrance. La ligne est franchie en 47'38". C'est le temps que j'espérais, et pourtant je n'ai pas le sourire attendu en franchissant la ligne, j'ai l'impression d'avoir couru "à l'envers". Au lieu de partir tranquillement et de finir "facile" mais plus vite, j'ai fait tout le medium_6595re2.jpgcontraire.

    C'est la restitution du dossard (avec puce électronique intégrée). En échange, le traditonnel tee-shirt et le sachet de ravitaillement aux couleurs d'une banque qui se dit pleine de bon sens. À la sortie du sas je retrouve JaPal avec qui j'échange les premières impressions. Elle est rassurée de me voir à peu près en bon état car elle avait nettement perçu ma baisse de régime entre les deux tours.

    Maintenant, retour at home pour la douche. Nous croisons la longue file des concurrents (parmi lesquels Madame et Monsieur "Landolina") qui continuent leur procession vers l'arrivée, leur prodiguant quelques encouragements. Je me dis que beaucoup souffrent plus que moi et, redevenu spectateur, je me sens admiratif…

    Le bilan? Au-delà des chiffres et d'un anecdotique classement (320ème sur 793 classés au "scratch", comme on dit), il me reste le plaisir de m'être retrouvé au milieu d'un peloton, d'être allé jusqu'au bout et d'avoir atteint mon objectif. Et puis, même si je sais que j'ai mal couru, j'ai pu me rendre compte (sur les premiers kilomètres) que je serais sans doute capable de faire mieux la prochaine fois, avec un entraînement adapté. Qui sait? Peut-être 45'00" le 9 juin pour le 10 bornes de l'A.S.P.T.T. Châlons? C'est le défi que je me lance!

     À suivre…

  • Courir pour la vie...

    Courir pour la vie, c'est possible

    Si vous ne savez pas comment occuper votre dimanche 1er avril, il est une possibilité à laquelle vous n'avez peut-être pas pensé et qui vous permettra de concilier deux choses: faire bouger votre corps et participer à une bonne œuvre.

    medium_pict0033.2.jpgEn ce dimanche (et ce n'est évidemment pas une plaisanterie) est en effet organisé le semi-marathon de Châlons en Champagne dont les recettes sont affectées à une association caritative ou humanitaire.

    Pour plus de renseignements, adressez-vous au secrétariat du C.O.C.A.A. (Club Olympique de Champagne Argonne Athlétisme) qui organise l'évènement de main de maître.

    Et si les 21,1 km sont trop longs, vous pouvez toujours prendre part à la course des 10 km (les 2 courses sont classantes et qualifiantes pour les Championnats de France, mais le sportif de haut niveau et le coureur anonyme cohabitent en parfaite harmonie). Et tout le monde est bienvenu, même les "Joggers en Colère". Et croyez-en un ex-coureur, 21 km à pied, non seulement ça use les souliers, mais ça calme!

    Les 2 courses (plus d'autres) se déroulent en ville, sur un parcours ultra-plat.

    medium_pict0056.jpg
    medium_plan_du_circuit_01_04_07.jpg
  • 18739

    Dimanche 9 avril 2006, 8h30. Sur France 3, Patrick Montel et Bernard Faure prennent l'antenne, sentant l'excitation monter, comme chaque année. Ils vont nous faire vivre pendant plus de 2 heures 30 l'aventure de la traversée de Paris, de la descente des Champs-Élysées à l'Avenue Foch en passant par la Place de la Bastille, le Bois de Vincennes, les bords de Seine, le Bois de Boulogne.

    Dimanche 9 avril 2006, Paris, Champs-Élysées, 8h40: dans 5 minutes, ils seront plus de 35000 à s'élancer pour un défi personnel, chacun le sien, mêlant plaisir et souffrance, le défi du marathon, 42,195km.

    Dimanche 9 avril 2006, 8h45: la marée humaine envahit les pavés et le macadam de Paris. Mais le dossard 18739 n'est pas au départ.

     

  • Naissance d'un marathonien

    J'ai sous-titré ce blog "Musique & Marathon" mais je n'ai pas encore parlé de course à pied… Voici donc ma première production en la matière…

    Pendant mon enfance, j'aimais courir. Mais je ne courais pas vite, du moins, en étais-je persuadé. Il est vrai que je me mesurais toujours à des camarades, à l'école ou ailleurs, qui avaient 1 ou 2 ans de plus que moi au minimum et, quand on a moins de 14 ans, ce sont des années qui comptent.

    À 13 ans, repéré par l'entraîneur du club de football local (ancien capitaine d'une équipe professionnelle à l'occasion d'une finale de coupe de France présidée par Charles de Gaulle) pendant un concours de tirs au but organisé lors de la kermesse annuelle de ce club, je devins un pratiquant (officiel) du ballon rond. Ma carrière, quoiqu' honorable, n'est pas restée dans les annales. J'aimais trop le sport pour le sport et ne me sentais pas à l'aise dans une logique guerrière qui commençait à prédominer dès la fin des années 60.

    Mais le football m'a permis de découvrir que je n'étais pas un mauvais coureur et que, même, je courais beaucoup plus vite que les autres une fois que j'étais en mouvement. Lors d'un cross organisé en classe de 3ème, j'ai même découvert que je pouvais semer mes camarades de classe sans effort.

    Et c'est ainsi que jusqu'en 1970 j'ai pu occasionnellement, entre deux matches, démontrer quelques qualités de sprinter long, réalisant des temps intéressants notamment sur 200 ou 400m.

    Ce fut ensuite la parenthèse pendant de longues années, avec une timide reprise en 1977, pendant mon service national en Allemagne. Bien sûr, de temps en temps, plein de bonnes résolutions, je décidais de reprendre le footing, mais ces résolutions duraient à peine plus que ce que durent les roses, l'espace de quelques matins.

    Et puis je devins père de famille en 1982 et, très vite, dès qu'elle approcha de ses 2 ans, je me rendis compte que ma Fillotte avait des dons réels pour la course. En 1993, après le cross de son collège où elle surclassa toutes les filles et même les garçons de son âge, elle entama une carrière d'athlète qui lui permit de se confronter au haut niveau pendant plus de 10 ans.

    La première fois que je l'ai vue en compétition, c'était en janvier 1994 à l'occasion du championnat départemental de cross-country. En assistant aux différentes courses du jour, notamment celle des vétérans (hommes et femmes), je me dis que ce qu'ils pouvaient faire, JE pouvais le faire. Je fis donc le pari de prendre une licence et, l'année suivante, de participer à ces championnats et de ne pas finir dernier (très ambitieux, non?).

    Le surlendemain, je commençais l'entraînement et, le dimanche suivant, ce fut ma première compétition, à plus de 41 ans: 5 km dans un village meusien. Ce fut un vrai supplice. Je passerai donc pudiquement sur ma performance du jour pour ne retenir qu'une chose: j'avais attrapé un virus qui ne m'a pas quitté depuis.

    La seconde course fut, en août, le "Cross de l'Espace", organisé à Narbonne Plage, couru pieds nus dans le sable brûlant et avec 2 passages dans une eau de mer qui paraissait glacée. Un superbe souvenir! Ensuite ce fut l'automne, l'enchaînement (raisonnable) des courses et la première licence. Courses sur routes, puis cross (où j'atteignis mon objectif) et à nouveau la route. En février, deuxième corrida dans le village meusien de mes débuts et une performance améliorée de 4'30" (ce qui donne une idée de la médiocrité de celle de l'année précédente).

    Je n'avais pas à l'époque l'ambition, ni même l'envie, de faire des courses longues. 10 km me paraissaient une limite raisonnable. Mais sport et raison ne sont pas toujours compatibles.

    C'est ainsi qu'en avril 1995, je me rendis avec mon club à Ay Champagne (commune bien connue des cruciverbistes) où étaient organisés un 10 km et un semi marathon (21,1 km). Je décidai au dernier moment de m'inscrire sur cette dernière distance, ce qui n'était pas raisonnable. Je n'avais en effet pas suivi de préparation spécifique (indispensable si l'on veut dépasser l'allure du footing tranquille). Et puis il faisait plus de 20° à l'ombre (et il n'y avait pas d'ombre) alors que le mardi précédent il neigeait et que le vendredi il faisait -5° au lever du jour. Et comme à mon habitude, je suis parti trop vite. J'avais donc décidé d'abandonner, épuisé et démoralisé, un peu après la mi-course, quand un "ancien" de mon club, me rejoignant alors que je marchais au bord de la route, me secoua en ces termes: "Tu n'as pas le droit d'abandonner avec le maillot du club sur le dos!". Je suis donc allé jusqu'au bout.

    Le vainqueur de ce jour-là s'appelait Pascal Fetizon. Gloire de l'athlétisme champardennais et lorrain, plusieurs fois sélectionné en équipe de France (Cross, Semi Marathon et Marathon) mais d'une modestie et d'une gentillesse exemplaires, il préparait la coupe du monde de marathon à laquelle il devait participer à Athènes 15 jours après. Le croisant sur les interminables lignes droites d'Ay, je fus impressionné de le voir, loin devant les autres, avec le sourire (pour lui, ce n'était qu'une course d'entraînement). Sur le chemin du retour, j'appris qu'il souhaitait revenir dans sa Marne natale, après quelques années dans les Vosges et qu'il était à la recherche d'un emploi. Il avait été licencié, lorsqu'il était cadet et junior, dans mon club où il n'avait laissé que de bons souvenirs. Je me dis donc que je pouvais essayer de faire quelque chose pour lui, compte tenu de mon métier de l'époque. C'est ainsi que j'ai pu l'aider à décrocher un CDD à temps partiel, bientôt amélioré par une convention locale lui permettant de dégager du temps pour l'entraînement (il devint ainsi champion de France de marathon, sur le marathon de Paris, en 1996). Il obtint ensuite un CDI à temps complet par le biais d'une convention d'athlète de haut niveau avec la Direction de la Jeunesse et des Sports lui permettant de consacrer la moitié du temps au sport. Par la suite, il est devenu champion de France, d'Europe et du Monde sur la distance de 100 km.

    Au cours d'une conversation dans un couloir (nous parlions plus d'athlétisme que de travail!), il me demanda si j'avais l'intention de faire un jour un marathon. Ce à quoi je répondis: "21 km, c'est déjà trop long (surtout moralement) alors, le marathon, c'est hors de question! Ou alors peut-être en 3h30". Je revois encore son regard amusé lorsqu'il me répondit que 3h30, ce n'était pas facile à réaliser (son record était de 2h14'35"). Mais pour moi, le chapitre marathon ne devait jamais s'ouvrir, c'est du moins ce que je croyais ce jour-là.

    Dimanche 6 avril 1997, je regarde le marathon de Paris sur France 3 et, quelques minutes après le départ, en voyant les concurrents passer Place de la Bastille, une évidence s'impose à moi: je ferai le marathon de Reims programmé le 12 octobre suivant. Cette ambiance, ces couleurs, cette joie des coureurs lorsqu'ils franchissent la ligne d'arrivée après avoir souffert, j'ai envie de connaître cela aussi. Le jour-même, lors de mon footing dominical, patatras! Chute et entorse de la cheville gauche. Mon marathon commençait de manière idéale…

    Mais ma résolution n'en faiblit pas pour autant. Et puis j'avoue que ma motivation s'est trouvée renforcée par le fait que je ne rencontrais que des gens (famille et club) qui tentaient de me dissuader. "Ce n'est pas raisonnable… Tu es trop vieux… Tu es trop grand… Tu n'as pas la morphologie… Ta foulée est trop longue…". J'ai tout entendu mais, parfois (qui a dit souvent?) je suis têtu.

    Bref, me voici vers le 14 juillet date fixée pour le début de mon plan d'entraînement. 3 mois à tenir quelles que soient les conditions météo, quelle que soit l'envie. 3 mois avec des séances agréables, d'autres rébarbatives, mais qu'il faut faire. Et puis quelques passages permettant de vérifier la pertinence de la préparation: 2 ou 3 compétitions (10 km et semi marathon) et une sortie footing plus longue. Cette dernière eut lieu 4 semaines avant la course sur un peu plus de 30 km avec 2 copains de club (meilleurs que moi) que je retrouverais au départ de 12 octobre. Ce jour-là, c'était l'état de grâce (il a même fallu m'arrêter pour que je ne fasse pas quelques kilomètres de plus, ce qui eut été stupide). Et à l'issue de la séance, j'ai annoncé mon objectif: entre 3h12' et 3h20'. Là encore, j'ai cru rencontrer des regards sceptiques…

    Dimanche 12 octobre 1997, lever très matinal pour un repas d'avant course, à 6h30 du matin. 75 kilomètres en voiture et le stress qui commence à monter, l'estomac à faire des nœuds. Je me mets en tenue, vérifie une dernière fois le serrage des lacets et je me rends en trottinant au pied de la Cathédrale de Reims où sera donné le départ. Pas d'échauffement réel pour une course si longue, compte tenu du niveau de performance espéré, les premiers kilomètres permettront de monter en rythme, tout doucement.

    20 minutes avant le départ, la plupart des concurrents sont déjà là, à piétiner, à tenter de ne pas avoir froid. Emmitouflés dans les sacs poubelles, certains ressentent le besoin de satisfaire un dernier besoin naturel (on boit beaucoup avant la course).

    10h15, enfin, le pistolet retentit. Les fauves sont lâchés… Le premier kilomètre est en descente légère, il ne faut pas se laisser gagner par l'euphorie, surtout ne pas aller trop vite. C'est facile, très facile. Le chronomètre est consulté chaque kilomètre, suis-je dans le bon tempo? Pas moins de 4'30" à chaque borne. Les choses vont bien mais, au bout de 20 minutes, je me rends compte que Reims n'est pas Paris. Beaucoup moins de monde sur la route (un peu plus de 2000 coureurs) et surtout des zones industrielles désertes à traverser. Et des zones urbaines où il faut demander aux spectateurs de nous encourager pour qu'on ne les confonde pas avec les réverbères. Qui n'a pas couru sur une longue distance ne peut pas comprendre à quel point le soutien du public est important pour nous, les anonymes! À ce propos, je vous parlerai un jour du contre-exemple, la superbe course Sedan – Charleville, et du merveilleux public Ardennais.

    Bref, les bornes sont avalées, sans souffrance Je dois penser à me ravitailler à chaque contrôle, boire et manger. Au fond de moi, néanmoins, sourd une angoisse (on pense beaucoup, en courant). Le fameux mur du 30ème ou 35ème kilomètre, vais-je le connaître?

    Le passage au semi marathon se fait en 1h30'15". Trop vite? Oui, mais je me sens tellement bien, je dois me retenir. Au 30ème kilomètre, je passe en 2h09'22", tout va toujours très bien. Et puis, insensiblement, les foulées sont plus lourdes, les faux plats plus raides et, surtout, les pensées deviennent négatives. Le temps était doux (14° au départ), d'un coup je trouve qu'il fait trop chaud. Alors je prends une éponge et me la passe sur les jambes. Mais l'eau est glacée et me voici avec des crampes. Je pense à l'abandon, je me sens seul dans cette zone désertique et je me demande qui a inventé ces ronds-points qui cassent l'harmonie rectiligne de la route. Et ces ponts qu'il faut escalader deviennent de vrais murs. Tiens, à propos, le mur du 35ème kilomètre, je sais ce que c'est maintenant!

    Mais la raison revient: il n'y en a plus pour si longtemps, après tout, et je suis toujours en avance sur mon objectif. La souffrance est toujours là, réelle, mais la tête se remet dans le bon sens, et les jambes suivent, moins vite, mais chaque foulée rapproche du but. Un passage près de l'arrivée, encore une boucle de 5 kilomètres. La flamme rouge. Le dernier pont à grimper, au-dessus de l'autoroute A4. Et enfin la plongée vers le tapis rouge d'arrivée, avenue Marchandeau. Et là, c'est le bonheur à l'état pur. Je l'ai fait, en 3h11'14". Je pleure et je ris en même temps, la fatigue, l'émotion, tout se mélange. Je l'ai fait. Et déjà, j'ai envie de recommencer.

    Et j'ai recommencé, l'année suivante, améliorant mon chrono de près de 5 minutes. Et pourtant j'étais déçu parce que j'avais craqué moralement à 3 km de l'arrivée, sans raison, alors que, physiquement, je pouvais continuer pendant un certain temps.

    Le 9 avril prochain, je devais participer au marathon de Paris avec le dossard 18739. Mais je devrai renoncer. Cette fois, c'est le corps qui m'a trahi.

    J'espère que ce n'est que partie remise. J'espère que quelques-uns parmi mes nombreux 4 ou 5 lecteurs auront un jour envie de tenter l'aventure. Pour l'ambiance, pour l'effort gratuit, pour la beauté du sport.

    Et dites-vous bien qu'un marathon, c'est moins difficile qu'on ne le croit. Ça ne dure que 3 heures, ou 4 heures, ou 5 heures, selon son niveau ou son envie. Il faut simplement s'astreindre à une discipline rigoureuse (mais pas spartiate) pendant 10 à 12 semaines. Et celui qui va au bout gagne le respect, même des meilleurs.