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  • Un disque, un jour: Marjory Razor Blade (1973)

    KEVIN COYNE: MARJORY RAZOR BLADE

     

     

    Nancy, lundi 23 février 1974. Il y avait à l'emplacement actuel de la FNAC un grand magasin qui occupait l'ensemble de l'immeuble: "Les Magasins Réunis". Au rez-de-chaussée, se situait le rayon disques, ma foi fort bien achalandé, où je laissais bon an mal an, depuis un peu plus de 3 ans, une bonne partie de mon salaire (eh oui, j'avais la chance d'être étudiant et de gagner ma vie en même temps).

     

    Ce début d'après-midi ensoleillé était placé sous le signe du désœuvrement. On devait être en période de grève (un peu avant peut-être), celle dont le slogan était "nous viendrons à bout d'Haby", en référence au Ministre de l'Éducation Nationale du moment.

     

    Dans un bac, je découvris un objet qui attira mon attention. Un double album à un prix abordable, un artiste dont la trogne et la dégaine me plaisaient. Je ne le connaissais même pas de nom mais je l'imaginais en folk singer anglais, impression confirmée par la liste des instruments parmi lesquels la guitare acoustique, 6 et 12 cordes, la mandoline, la slide guitare.

     

    Et puis il y avait le label, une nouvelle marque lancée par un Anglais un peu fou, Richard Branson: Virgin, jusque-là magasin de disques branché de Londres.

     

    Je fis donc l'acquisition du précieux objet et me ruai vers ma chambre d'étudiant, rue de Metz, dans un appartement "chez Paulette" où je voisinais avec deux autres fous de musique (et qui, eux, pratiquaient de surcroît).

     

    Et là, ce fut l'horreur. Dès les premières notes, ou devrais-je dire les premiers miaulements, je regrettai mon achat. Une chanson a cappella "Marjory Razorblade" torturée par une voix indéfinissable mais tout sauf harmonieuse. J'étais avant tout un amateur de belles mélodies et de belles harmonies vocales. Quelle bêtise n'avais-je pas fait? J'écoutai néanmoins les 4 faces et, même si je notai quelques moments de répit comme "Talking to no-one", "House on the hill" ou "Jackie and Edna", l'impression globale était atroce. Comment pouvait-on écrire et chanter des titres comme "Karate king" ou "Dog Latin"? Enfin, écrire et chanter c'était beaucoup dire!

     

    Je regrettais vraiment ma dépense inconsidérée. Aussi décidai-je de m'infliger une punition afin, à l'avenir, de réfléchir avant de dépenser. J'avais le choix entre 2 Pater Noster et 3 Ave Maria ou une deuxième écoute du disque. Et c'est cette dernière solution que je retins. Et là, tout avait changé. Je n'entendais plus la chanson-titre de la même façon et, déjà, "Talking to no-one" se gravait en moi au point que je le fredonnais dès la première note.

    Une fois le dernier morceau de la quatrième face "Chicken wing" terminé, je n'eus qu'une envie: écouter l'œuvre dans son ensemble une troisième fois, ce que je fis immédiatement.

     

    Depuis, c'est une histoire d'amour pour un artiste unique, qui dessinait et peignait également, avec un style très personnel.

     

    Kevin nous a malheureusement quittés en décembre 2004 victime d'une maladie pulmonaire handicapante. Il a laissé une œuvre musicale à nulle autre pareille en 35 ans d'une carrière commencée en 1969 avec son groupe "Siren". Et deux albums nouveaux ont été publiés depuis son départ.

     

    Quant à "Marjory Razorblade", il a été réédité en CD en 1990 et est toujours disponible, agrémenté de 2 titres bonus publiés à l'origine en single. Deux regrets cependant: un morceau ("Eastbourne Ladies") a été raccourci de plus d'une minute et le livret oublie de préciser des détails tels que les noms des musiciens! En lieu et place, un catalogue des parutions de Virgin en CD, dont l'album suivant de Kevin: "Blame It On The Night", qui est mon favori… mais qui n'a jamais été édité en CD!

  • R.I.P. - Que sont mes disquaires devenus?



    VERDUN

    Card Shop (Vidéo Disques), Librairie Frémont, Pop Music, Fivet, Monoprix

    NANCY

    La Discothèque, Dupont-Metzner, Le Vent, Magasins Réunis, Martin-Musique, Pop 35, La Samaritaine, Chorus (Laxou)

    METZ

    Bémer Musique

    CHÂLONS SUR MARNE (CHÂLONS EN CHAMPAGNE)

    À la Clé de Sol, Vitamine C, Arcane, Audiopro, HiFi Club, Madison, Grand Bazar de la Marne, Prisunic, Parenthèses

    PARIS

    Music Action, Radio-Pygmalion, FNAC Châtelet, Open Market, Givaudan, Lido Musique, l'Anarchie des Accords, Tarentula, Zéro Plus

    REIMS

    À la Clé de Sol, Librairie Michaud, Nuggets, Superclub

    ÉPINAL

    La Calypsothèque, Nuggets, Magasins Réunis

    EVRY 2

    Madison, Guirao SA, Nouvelles Galeries, Euromarché

    Vente Par Correspondance

    Wah-Wah Express, Inter 33, Dave Music, Ada Productions

    STRASBOURG

    l'Oreille d'Or

    BLOIS

    Cyborg

    GENÈVE

    Doctor Boogie

    Cet inventaire à la Prévert vous fait vous demander, mes chers lecteurs: "Mais où veut-il bien en venir?". Il s'agit simplement d'une liste, sans doute pas exhaustive, des lieux où j'ai dépensé tant de Francs ou d'Euros, depuis près de 40 ans, pour me constituer une discothèque ma foi imposante, au hasard des pérégrinations et méandres de de la vie. Ils ont un point commun, c'est qu'ils ont tous disparu du paysage (à l'exception de 2 ou 3 qui ont seulement supprimé leur rayon disques), ce qui a conduit mon frère à me traiter d'Attila parce que que là où je passe, les disquaires trépassent et jamais ne refont surface.

    Il y a là, pêle-mêle des disquaires exclusifs et passionnés, des vendeurs d'instruments de musique ou d'élecro-ménager, des libraires. Il y a aussi des supermarchés ou des grands magasins dont la qualité des rayons disques feraient rêver bien des musicophiles aujourd'hui.

    Heureux temps où l'on pouvait se promener dans une ville, pousser une porte et trouver en fouillant fébrilement, immanquablement, le trésor qui allait nous procurer des heures de bonheur, en attendant le prochain.

    Finalement, c'est bien d'avoir été jeune il y a longtemps...

     

  • Un disque, un jour: Sammy Walker - Song for Patty (1975)

    Sammy Walker – Song for Patty (1975)

     

     

    L'histoire commença en 1978. Rock & Folk, dans sa rubrique "disques import", publia un article qui attira mon attention. Un certain Sammy Walker venait faire quelques concerts en France, notamment pour un festival-hommage à Woody Guthrie. Et pour l'occasion, WEA (qui à l'époque promouvait encore la musique) avait importé les 2 albums publiés en 1976 et 1977 par le jeune Sammy ("Sammy Walker" et "Blue Ridge Mountain Skyline") et objets de la chronique rocketfolkienne. Une voix à la Dylan, des influences à charcher chez Woody Guthrie, Hank Williams, Merle Haggard ou Phil Ochs. Bref, il me fallait ces disques. Mais voilà, les temps étaient durs (12 mois d'armée et un mariage ne m'avaient pas enrichi!) et les disquaires locaux peu compétents. Je ne connaitrais donc jamais Sammy Walker.

     

    Samedi 17 Mars 1979, Épinal, La Calypsothèque (disquaire compétent et disparu depuis longtemps); je fouille dans les étagères gorgées de 30cm et découvre un rayon folk. Et là, ô miracle, au milieu d'autres publications signées "Le Chant du Monde", je vois apparaître un superbe objet rouge "Sammy Walker: Song for Patty". Je ne savais pas encore que je tenais entre mes mains ce qui est peut-être le dernier grand disque de "topical songs" de l'histoire. Mais la présentation déjà me séduisait: pochette tripyique, avec les paroles en anglais et en français (traduction de l'excellentissime Jacques Vassal, qui signait également les commentaires de présentation). Et puis le disque, publié en 1975 était produit par le grandissime Phil Ochs, disparu (he died from his own hand) en 1976.

     

    Il me fallut attendre le lendeman soir et le retour at home pour poser la rondelle sur mon électrophone (pour les plus jeunes, c'est un appareil qui servait à écouter de la musique). Et là, nouveau miracle: cette voix, cette guitare! Ce Sammy Walker, 22 ans tout juste, c'était Dylan 15 ans plus tôt, avec des accents de Woody Guthrie, c'était même plutôt mieux! Aussi bon que John Prine, c'est dire! Une guitare, une voix, et parfois les chœurs de Phil Ochs, Rien que la substance. 27 ans après, je réécoute ce disque avec le même plaisir et je maintiens mon avis de l'époque. Un vrai musicien (il avait commencé le piano à 5 ans et vivait avec des parents fous de musiques), un vrai poète.

     

    Et les chansons, les mélodies, les textes! Dès le début "Song for Patty" nous ramène vers un fait divers qui défraya la chronique; Patricia Hearst, riche héritière, avait été enlevée par des révolutionnaires (The Symbionese Liberation Army) dont elle finit par épouser la cause "But she opened her eyes and looked around her / And saw how often money takes the place of man / Now she's runnin' from a world that doesn't want her / Hidin' in the silence and the wind".

     

    Au bout de 2 minutes, Sammy m'a conquis. Et puis vient "Ragamuffin Minstrel Boy", visiblement dédié à Bob Dylan ("That ragamuffin minstrel boy from a little minin' town"). Des titres humoristiques comme "My Old Yearbook" ("My girl dreamed about Prince Charming, and she ended up with me"). D'autres plus politiques "A Simple Hour Operation" (et un règlement de comptes avec Richard Nixon comparé à Hitler). "Closin' time", critique sociale à l'habillage très poétique et le très émouvant "Testimony of a dying lady" qui met en exergue (et c'est toujours d'actualité) l'état du système de la santé et de la justice aux USA. Tout est à l'avenant.

     

    Dix titres sont de la plume de Sammy, les deux derniers sont une reprise de Woody Guthrie "I ain't got no home (In this world any more)" et une de Phil Ochs "Bound for glory (The story of Woody Guthrie)". Phil dont il est émouvant d'entendre la voix, une dernière fois, un an avant son suicide.

     

    Ce disque n'a malheuresement pas obtenu le succès auquel il pouvait légitimement prétendre. Sa qualité a été sans doute éclipsée par le destin tragique du producteur dont on nota que, à l'époque où sa santé mentale se dégradait rapidement, il était encore capable de détecter le talent. Et quel talent! Et la chanson-titre, en raison de son histoire, a sans doute fait de l'ombre aux autres.

     

    Août 1979, Strasbourg, l'Oreille d'Or (un disquaire plein de trésors de la Place Kléber, lui aussi disparu). Je trouve, alors que je ne l'espérais plus, le troisième album de Sammy "Blue Ridge Mountain Skyline", plus country, plus proche de John Prine que de Bob Dylan. Et encore une reprise de Woody Guthrie ("Dust storm disaster") et une, superbe, de Jimmie Rodgers, le blue yodeler ("Waiting for a train").

     

    Mars 1980, Châlons sur Marne, à La Clé de Sol (disquaire disparu), c'est l'acquisition de "Songs from Woody's Pen", album hommage paru l'année d'avant.

     

    Un disque, le second "Sammy Walker", que je n'ai pas réussi à trouver, et puis 20 ans de silence. Et arrive internet. Un jour de septembre 2000, je tape par hasard le nom de Sammy Walker sur le browser de mon disquaire en ligne favori (CD Now) et là, nouveau miracle: les 2 albums Warner, en CD, sont disponibles en import japonais. Très chers. Mais qu'à cela ne tienne.

     

    Mais Sammy avait bel et bien disparu, rien de nouveau depuis 1979.

     

    Avril 2003, cette fois, c'est le moteur de recherche d'Amazon. Je tape sans y croire "Sammy Walker". Et là, nouveau miracle. Deux nouveaux disques apparaissent: "Sammy Walker in Concert", enregistré live en Italie en 1989 et "Old Time Southern Dream" enregistré en 1994. Encore deux grands albums. La magie est toujours la même.

     

    Depuis, la voix de Sammy Walker s'est encore fait entendre sur deux titres de l'album-reportage de l'Anglais Martin Stephenson "The Haint of the Budded Rose (A Musical Ramble Through North Carolina)" en 2000: une reprise "Green, Green Grass of Home" et une composition: "Some Day I'm Gonna Rock & Roll".


    Six albums, six trésors que l'on peut encore trouver, si l'on cherche bien, parfois chers, parfois d'occasion ou même en "custom record" pour deux d'entre eux ("Song for Patty" et "Songs From Woody's Pen" publiés chez Folkways)

     

    Si vous avez aimé le jeune Bob Dylan, Sammy Walker est pour vous aussi…

  • Elliott

    Quelques lignes pour ceux qui aiment la musique gratuite. Une petite visite s'impose sur le site du grand et pas assez reconnu Elliott Murphy, le plus Français des songwriters américains.

    http://www.elliottmurphy.com

    On y trouve de tout, y compris la vente en ligne des disques de l'artiste.

    Mais il y a aussi une rubrique MP3 & Video où l'on peut télécharger un certain nombre de choses rares et sympathiques.

    À noter en particulier une reprise de "Rockin' in the free world" de Neil Young, enregistrée avec Gary Louris (des Jayhawks) et Neal Casal.

     

  • C'est grave, Docteur? (volume 3)

    NINETEEN-SIXTY-SEVEN PART 2


    L'anné 1967 fut une des plus riches et des plus novatrices de ce qu'on appelait la pop-music. À partir de là, plus rien ne fut plus jamais pareil. Les barrières tombaient petit à petit, les étiquettes devenaient étriquées. L'imagination était au pouvoir pour quelques années avant l'inévitable reflux qui commença au milieu des seventies.
    L'Angleterre fut en cette année-là, Beatles obligent, à la tête du mouvement. Mais les States suivirent rapidement et produisirent quelques belles œuvres. Et puis il y eut l'extra-terrestre à la carrière météoritique, Jimi Hendrix. J'aurais aimé aussi parler du Dylan de 1967 mais ce fut pour lui une année sans album consacrée à la convalescence après un terrible accident de moto qui faillit lui coûter la vie, et à des répétitions dans les caves de Big Pink avec The Band (les enregistrements firent la joie des bootleggers et des collectionneurs avant d'être publiés officiellement en 1975). Mais le Bob Dylan d'avant était mort et beaucoup attendirent en vain son retour pendant des années; en ce sens aussi, 1967 fut une année-charnière.
    Voici donc ma sélection des 10 albums de 1967 aux Etats-Unis. J'aurais pu y ajouter Eric Andersen, Arlo Guthrie, Kaleidoscope, Janis Joplin avec Big Brother & the Holding Company et quelques autres. Mais il fallait bien choisir…


    THE BEACH BOYS    "SMILEY SMILE"
    Après quelques années de succès grâce à des mélodies faciles chantant le soleil, le surf, les filles et les voitures, les Beach Boys et en particulier l'aîné des frères Wilson, Brian étaient enfin considérés comme autre chose qu'un groupe pour teenagers. Le triomphe, fin 66, de "Good vibrations" n'y était pas pour peu et Brian Wilson commençait à être perçu comme un véritable génie du son, dans la lignée de son maître, Phil Spector. Il s'attela donc à un projet ambitieux, "Smile" qui, reporté de mois en mois, finit par ne pas voir le jour. Brian aurait voulu faire son "Sgt. Pepper", en fan des Beatles qu'il était, mais il jugea paut-être (à tort) la barre placée trop haut. En lieu et place, on eut droit à "Smiley smile", publié en septembre. Ce fut une grande déception pour les fans. La montagne espérée avait accouché d'une souris, ou plutôt d'un disque bizarre, expérimental, un collage plus qu'un album. La santé mentale de Brian Wilson n'y résista pas. Néanmoins, "Smiley smile" mérite qu'on s'y arrête parce qu'il ne ressemble à aucun autre disque de l'époque. Et puis il y a "Good vibrations" et "Heroes & villains", deux authentiques chefs d'œuvres! Et "Vegetables" avec la présence de Mr. McCartney.


    TIM BUCKLEY    "GOODBYE & HELLO"
    Jeff Buckley, décédé à un peu plus de 30 ans, n'a produit qu'un seul album studio, l'excellent "Grace". Son père Tim, décédé à un peu plus de 28 ans en a publié 9. Celui-ci est son deuxième opus, paru alors qu'il n'avait que 20 ans. Et pourtant, l'histoire a injustement rendu le fils plus grand que le père. Le premier album de Tim, disque éponyme, avait une couleur folk-rock. Dans "Goodbye & hello", le folk se teinte de psychédélisme: "Sgt. Peppers" était passé par-là. Plusieurs morceaux sont co-composés avec le poète Larry Beckett. Des titres courts à la construction classique comme "Morning glory" ou "Once I was", mais aussi des compositions plus ambitieuses comme "Goodbye and hello". Un grand artiste était en train de se révéler. Il allait par la suite montrer d'autres facettes de son talent, abordant d'autres rivages musicaux, et une voix comme il y en eut peu dans l'histoire de la rock-music.


    BUFFALO SPRINGFIELD    "BUFFALO SPRINGFIELD AGAIN"
    Encore un disque dont on se rendit compte après coup qu'il avait marqué l'histoire. Deuxième album du groupe de Steve Stills, Neil Young et Richie Furay, "Again" constitue un important pas en avant par rapport à son prédécesseur. Et, surtout, il révèle à la face du monde (qui ne s'en rendra vraiment compte qu'après "Déjà vu" de Crosby, Stills, Bash & Young) l'immense –et original – talent du Canadien Neil Young. "Mr. Soul", "Expecting to fly", "Broken arrow" sont trois perles au mileu des compositions de Steve Stills comme "Rock & roll woman", "Everydays" ou "Bluebird" qui tiennent également fort bien la route. Richie Furay (chanteur principal du groupe à sa constitution) a bien du mal à se faire entendre malgré un "Child's claim to fame" ou un "Sad memory" de fort bon aloi. Et pourtant, c'est lui qui tenta de sauver le groupe. Il échoua, alors il fonda Poco. Qui peut l'en blâmer? Pas moi, en tout cas…



    THE BYRDS    "YOUNGER THAN YESTERDAY"

    Gene Clark n'était plus là depuis l'album précédent "5th dimension" et le groupe était orphelin de son meilleur auteur-compositeur (Gene Clark n'a jamais eu la reconnaissance qu'il méritait de ce point de vue). "Younger than yesterday", quatrième album des Byrds marque un virage pour un groupe en pleine évolution. Bien sûr, Jim/Roger McGuinn est toujours là avec sa célèbre Rickenbaker 12 cordes. Bien sûr, il y a un tube dans la veine des précédents "So you want to be a rock 'n' roll star". Bien sûr, il y a la traditionnelle reprise de Dylan "My back pages", dans la veine de "Mr. Tambourine man". Et pourtant, ce disque ne ressemble plus vraiment aux précédents. D'abord parce que David Crosby, avec ses compostions introspectives et personnelles "Mind gardens" ou "Everybdy's been burned" se place un peu en marge du groupe. Et aussi parce que Chris Hillman, bassiste et élément le plus jeune du quatuor monte en puissance en qualité de compositeur. Il signe ici en effet 4 titres (sur 11) et co-signe "So you want to be a rock 'n' roll star". Il est curieux de constater à quel point celui qui était un mandoliniste dans des groupes de bluegrass est devenu un bassiste capable de ciseler des pop-songs aux accents rocks qui n'auraient pas déparé un disque des Beatles (circa 1964-1965): "Have you seen her face", "Time between" ou "The girl with no name" par exemple. Et c'est sans doute lui qui est le vrai ciment d'un groupe déchiré par la rivalité entre McGuinn et Crosby. Un disque dont la fraîcheur ravit toujours aujourd'hui.


    THE DOORS    "THE DOORS"
    Ce fut l'un des deux chocs de l'année de l'autre côté de l'Atlantique. Le second fut… mais vous l'avez deviné! Il était beau, il avait tous les talents. Jim Morrison était riche et révolté contre l'establishment symbolisé par son officier de père. Dès les premières notes de "Break on through", on sait qu'on a affaire à quelque chose de différent. 9 compositions du groupe (les textes sont de Jim Morrison) et deux reprises: le blues de Willie Dixon et Howlin' Wolf "Back door man" et "Alabama song (Whisky bar)" extrait de "L'opéra de quat' sous" de Bertolt Brecht et Kurt Weill. J'aurais pu choisr "Strange days", deuxième album du groupe paru la même année et son "When the music's over". Oui mais dans "The Doors", il y a "The end" et ses 11'35" de colère et, pour moi, surtout "Light my fire" qui reste un de mes titres favoris de l'histoire du rock (même si j'ai peut-être connu d'abord la version acoustique de José Feliciano). Ce fut un choc. Les Doors entraient dans une légende que la mort prématurée de leur charismatique leader, en 1971, allaient encore aviver…


    THE JIMI HENDRIX EXPERIENCE    "ARE YOU EXPERIENCED"
    J'ai parlé de choc mais, là, ce fut un séisme. Je règle tout d'abord une question: pourquoi " Are you experienced" plutôt que "Axis: bold as love" paru également en 1967? Parce que c'est mon choix. Parce que ce fut le premier. Parce que je possède une réédition qui inclut les 3 singles qui on précédé l'album: "Hey Joe", "Purple Haze" et "The wind cries Mary" qui ne figurent pas dans l'édition originelle (anglaise) de l'album. Eh oui, ce sont les Anglais (et plus précisément Chas Chandler des Animals) qui ont révélé celui qui n'était jusque-là qu'un musicien de studio à la renommée grandissante dans le milieu du Rhythm & Blues. Cela dit, ai-je le droit, moi misérable terrien, de parler de Jimi Hendrix, de dire la folie qui a entouré ses premières apparitions européennes en Angleterre (et même à l'Olympia en première partie de Jauni à l'idée). C'est le génie à l'état pur. Personne n'a approché, personne n'approchera jamais LE Jimi de 1967 et 1968. C'est du blues en fusion. La formule du trio déjà rôdée par Cream prend ici une autre dimension. Il est toujours urgent de se ruer sur les 2 albums précités et sur "Electric ladyland". "Red house", "Fire", "Third stone from the sun", "Foxy lady"… C'est la musique d'un extra-terrestre!!! Et il conquiert encore de nouveaux fans dans les jeunes générations.


    PHIL OCHS    "PLEASURES OF THE HARBOR"
    Dylan n'est pas là. Mais il y a Phil Ochs, autre figure phare du protest song, journaliste et chanteur. Plus politique mais moins médiatisé que son confrère, Phil Ochs a toujours souffert de ne pas bénéficier de la même reconnaissance, de demeurer dans l'ombre de son rival. Ce n'est qu'après son décès tragique (suicide) en 1976 que la critique le reconnut vraiment comme l'un des auteurs les plus sincères et les plus humains de sa génération, que son approche soit politique ou tout simplement poétique. Après 2 albums studio "All the news that's fit to sing" et "I ain't marching anymore", Phil Ochs produisit un album live "Phil Ochs in concert", toujours accompagné de sa seule guitare. Et puis le vent de 1967 (toujours "Sgt. Pepper") mais aussi le virage électrique de Dylan l'incitèrent à explorer d'autres directions. C'est ainsi que naquit "Pleasures of the harbor", sans doute son œuvre la plus accomplie. Disque ambitieux mais totale réussite ou le pianiste classique Lincoln Mayorga assure un parfait contre-point à la guitare et à la voix de Phil. Les arrangements sont de Ian Freebairn-Smith, également musicien d'origine classique, qui donne un côté pop-baroque à la production où clavecin et flûte côtoient en harmonie batterie, cuivres et cordes. Les morceaux sont longs, souvent plus de 8 minutes, la critique sociale est moins implicite, mais bien présente. Ce n'est pas de la musique "easy listening". C'est simplement un grand, un très grand disque, d'une richesse qui ne se dévoile qu'à ceux qui la méritent.


    THE TURTLES    "HAPPY TOGETHER"
    Il y eut les Crickets (de Buddy Holly), les Beatles, les Byrds. La mode était aux noms d'animaux (éventuellement déformés), aussi les Crossfires décidèrent un jour de s'appeler The Tyrtles avant de rétablir l'orthographe correcte. Et comme les Byrds, ils commencèrent par une reprise folk-rock de Dylan "It ain't me, babe". "Happy together" est leur troisième et meilleur album avec, outre le morceau titre, l'irrésistible "She'd rather be with me", "Guide for the married man" et une composition de l'inconnu (à lépoque) Warren Zevon ("Like the seasons"). La grande force des Turtles était la qualité des harmonies de Mark Volman et Howard Kaylan qui, après la fin du groupe, allaient enregistrer sous le nom de Fluorescent Flo & Eddie puis de rejoindre Frank Zappa & The Mothers of Invention.


    THE VELVET UNDERGROUND    "THE VELVET UNDERGROUND & NICO"
    S'agit-il seulement d'un grand disque? Ou d'un monument qui a influencé et influence encore des dizaines d'artistes aujourd'hui, même en France? Difficile de le dire . Ce qui est sûr c'est que ce disque a défrayé la chronique. Produit par Andy Warhol, sa pochette était orné d'une banane qui, dans les premières éditions, s'épluchait réellement. Et puis la présence de la sulfureuse et germanique Nico ajoutait un air de mystère à ce groupe issu de l'underground New-Yorkais. La moitié des morceaux sont devenus des classiques. Lou Reed est entré aux panthéon du rock (plus dans la catégorie auteur que chanteur, il faut le reconnaître). Il est difficile d'écouter "Femme fatale" ou "I'll be your mirror" sans que les airs lancinants ne trottent dans la tête pendant des heures. Et puis il y a "Heroin" et encore "All tomorrow's parties". Et le reste ne serait que littérature…


    THE YOUNGBLOODS    "THE YOUNGBLOODS"
    Après 2 albums solo ("The soul of a city boy" et "Young blood"), entre folk et blues, Jesse Colin Young, accompagné de Banana (Lowell Levinger III), Joe Bauer et Jerry Corbitt, fonda les Youngloods. Leur premier album oscille lui aussi entre les mêmmes sphères. En plus des compositions du groupe, quelques reprises de Blind Willie McTell, Mississippi John Hurt et Jimmie Reed pour le blues, Chet Powers et Fred Neil pour le folk, forment un ensemble sans génie, certes, mais qui aujourd'hui encore se laisse écouter sans déplaisir. à la sortie de l'album, ce fut surtout la composition de Chet Powers "Get together" (devenue un hymne hippie) qui fit la réputation du groupe. Ce dernier se bâtit une renommée respectable avant de se séparer au début des années 70. Jesse Colin Young redémarra alors une carrière solo et produisit quelques joyaux entre 1973 et 1977 avant de retomber dans un relatif anonymat.

    Voila comment la musique que j'aime a pris un nouveau tournant. Je crois que je ne m'en suis jamais remis, et je ne suis pas le seul... C'est grave, Docteur?

    To be continued...