Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Blue Umbrella - Page 21

  • Le petit Nicolas

    Ou comment la pensée peut n'être pas unique.

    Je parle rarement politique en ce blog, mais l'approche des élections va peut-être modifier cet état de fait. Beaucoup de blogs traitent du sujet, d'une manière souvent aveuglément partisane.

    Le Petit Nicolas, pour moi, sera toujours celui de Sempé et Goscinny, qui m'a tant fait sourire il y a plus de 40 ans maintenant.

    Mais il est un autre Nicolas, petit (sans majuscule) qui ne me fait pas du tout sourire. Et cela n'est pas valable que pour moi. Et si ce Nicolas est petit, ce n'est pas une question de physique (non à la discrimination par la taille!).

    A cet égard, connaissez-vous cette anecdote?

    A l'entracte d'une manifestation à laquelle il assistait, le Général de Gaulle s'était rendu aux toilettes. Un individu (député ou sénateur) s'approcha de lui et lui dit: "Mais, mon Général, je suis presque aussi grand que vous". A quoi Charles de Gaulle répondit: "Mais non, mon cher, vous êtes simplement aussi haut"!

    Le Nicolas dont on parle tant, même s'il avait mesuré 1m90, aurait quand même été le petit Nicolas.

    Cette introduction pour vous inviter à vous rendre sur le blog de Laurent dont la conception de la politique et l'honnêteté (le courage) méritent un détour.

     

  • L'homme tranquille

    QUIET MAN

    Words & Music by John Prine

    From the album "John Prine" (1971)

    Strolling down the highway with my shoes in my hand
    I don't talk much I'm a quiet man
    Beauty and silence both run deep
    And running like crazy while you are asleep

    Chorus:
    You got news for me, I got nothing for you
    Don't pin your blues on me
    Just go ahead and do whatever you wish to

    Last Monday night I saw a fight
    Between Wednesday and Thursday over Saturday night
    Tuesday asked me what was going on I said,
    "Sunday's in the meadow and Friday's in the corn."

    Repeat Chorus:

    Hocus-pocus, Maladjusted
    Don't you think my tears get rusted
    Steady losing means you ain't using
    What you really think is right

    Repeat Chorus:

    Oodles of light what a beautiful sight
    Both of God's eyes are shining tonight
    Rays and beams of incredible dreams
    And I am a quiet man.

    Oodles of light what a beautiful sight
    Both of God's eyes are shining tonight
    Rays and beams of incredible dreams
    And I am a quiet man.

    Oodles of light what a beautiful sight
    Both of God's eyes are shining tonight
    Rays and beams of incredible dreams
    And I am a quiet man.

  • Femmes, je Vous aime (5)... Aussie, aussi...

    Audrey Auld (Bill & Audrey, Audrey, Audrey Auld, Audrey Auld Mezera)

    C'est entendu, la country music est une musique typiquement américaine, je veux dire par là originaire des United States of America, ce pays des grands espaces, grand défenseur de la liberté (Ce sont eux qui le disent, comme les Français se disent dépositaires des droits de l'homme… Bons sujets à développer, non?).

    Et pourtant, c'est un genre qui va chercher ses influences un peu partout dans le monde, l'Europe, principal pourvoyeur de l'immigration aux 18ème et 19ème siècles ayant exporté des traditions musicales en provenance essentiellement des îles britanniques, mais aussi d'Espagne, de "Germanie" ou de France qui ont donné naissance aux différentes tendances de la musique campagnarde américaine.

    Mais la country music s'est vite enfermée dans un système et a perdu une grande partie de son âme, corrompue qu'elle était par le tout puissant establishment de Nashville. Sont alors arrivés les "Outlaws", la seconde génération du bluegrass et un certain nombre de jeunes (ou moins jeunes) artistes qui ont redonné un nouveau souffle au genre (à cette égard, reportez-vous à la remarquable chronique écrite sur le monument "Will The Circle Be Unbroken").

    Et puis, les Etats-Unis ont dû partager. Le Canada, bien sûr a fourni de grands auteurs-compositeurs. Gordon Lightfoot, par exemple, fait partie de ceux dont le répertoire a été le plus pillé par les Étatsuniens. Plus récemment, on a vu émerger quelqu'un comme Fred Eaglesmith qui est, pour moi, de la trempe de ses meilleurs voisins du sud, en conservant une rusticité et une authenticité réjouissantes tout au long d'une carrière démarrée au début des années 80.

    La lointaine Australie s'est également mise sur les rangs. On a connu, en provenance de cette insulaire contrée, dans le sillage des Easybeats et d'AC/DC pas mal de groupes de (hard)rock. Et dans un genre plus campagnard, des gens comme Keith Urban ou Kasey Chambers cartonnent chez l'Oncle Sam.

    Et vint Audrey Auld. Selon les albums elle s'appellera Audrey (et en duo Bill & Audrey), Audrey Auld ou Audrey Auld Mezera. Mais c'est bien de la même personne qu'il s'agit.

    Originaire de Tasmanie rurale, Audrey a suivi le parcours classique (imposé par son père, musicien de jazz) en étudiant le violon et le piano. Elle vint à la country music au travers de groupes post-punk comme Birthday Party, Bauhaus et Psychedelic Furs. Puis un professeur d'art lui fit découvrir Dwight Yoakam, Patsy Cline, Emmylou Harris et Loretta Lynn, déclanchant chez Audrey une véritable obsession pour le genre.

    À l'âge adulte, elle s'établit à Sydney où elle forma un groupe de country music "a cappella" avec 2 autres filles, puis se prit d'intérêt pour le western swing et créa "The Harmony Girls", groupe de swing à la saveur jazzy. Ce groupe devint Audrey & the Rhythm Wranglers et, peu après, Auld rencontra Bill Chambers (père de Kasey Chambers) avec qui elle commença à composer pour former, en 1997, le groupe Luke & the Drifters (Hank Williams enregistra une partie de son répertoire sous le nom de Luke The Drifter).

     

    medium_Bill_Audrey.jpgLOOKING BACK TO SEE (Bill & Audrey – 1999) Premier (et seul) album du duo, ce disque alterne reprises et compositions originales. Les influences sont clairement affichées. On trouve notamment 2 titres figurant sur l'album "GP" de Gram Parsons ("Kiss The Children" de Rick Grech et "We'll Sweep Out The Ashes" de Joyce Allsup). Ce choix démontre à tous le moins que ces deux-là n'ont pas peur des comparaisons, inévitables. Il y a aussi les classiques "You Are My Sunshine" (cf. "O Brother") au parfum très "Carter Family" ou "It Was The Whiskey Talking (Not Me)". Et les compositions du duo ne déparent pas l'ensemble, d'autant que le groupe réuni pour l'occasion (avec notamment Bill Chambers ou le pedal-steel guitariste Michel Rose) est tout à fait à la hauteur du défi.

    medium_Audrey_The_Fallen.2.jpgTHE FALLEN (Audrey – 2000) Cette fois, Audrey est seule et produit l'album. Mais Bill est toujours là, comme la plupart des musiciens de "Looking Back To See". Audrey a composé 10 des 12 titres et démontre un réel talent, se fondant dans le genre (c'est toujours de la country music) en y ajoutant sa propre sensibilité. Imaginez la plus triste des voix chantant encore une chanson mélancolique (en France on disait "chanson réaliste" entre les deux guerres) sur le thème de la pauvre fille abandonnée par son homme. La différence est que l'artiste ne blâme pas réellement le vilain monsieur: "I won't stop you when you go / 'Cause I'd leave me too" ("I'd Leave Me Too"). Le ton est donné et ce titre lance l'album de façon réjouissante, balançant entre country et western swing, avec une authenticité trop souvent oubliée à Nashville. Des  titres comme "Too Far to Fall" et "Still Holding On" mettent en valeur la steel guitare de Michel Rose. La voix d'Audrey craque et se brise dans la tradition classique de chanteuses comme Kitty Wells ou Loretta Lynn. Il y a un grand duo avec Dale Watson sur "Jackson" et une reprise de "Alcohol and Pills" de Fred Eaglesmith. "The Fallen" est véritablement un excellent début.

     

    medium_Audrey_Losing_Faith.jpgLOSING FAITH (Audrey Auld – 2003) Pour moi, tout est parti de là car, en fait, j'ai découvert Audrey Auld par hasard, par erreur devrais-je écrire. Je naviguais en effet sur iTunes cherchant un éventuel album de Kieran Kane et j'ai trouvé "The Fallen" que j'ai téléchargé sans vérifier. C'est alors que je me suis aperçu que c'était en fait un album d'Audrey Auld qui se terminait par un duo avec Kieran Kane ("Harmony"). Bienheureux hasard, car dès la première écoute, je fus séduit. Cet album confirme la capacité d'Audrey à écrire des textes de qualité, beaucoup plus profonds et incisifs que la moyenne de ce qu'on rencontre habituellement dans le genre, mariant tradition country et sensibilité moderne, avec toujours un humour et un sens de l'auto-dérision que l'on rencontre notamment dans le savoureux "The Next Big Nothing". Et l'habillage musical n'est jamais dépourvu d'énergie, nous rappelant en permanence que la musique est faite avant tout pour divertir. À noter un autre duo, avec le Canadien Fred Eaglesmith sur "B-Grade Affair" et une apparition de Mary Gauthier sur "Ain't No Joy". Comme pour les précédents albums, pedal steel, dobro ou mandoline tissent une toile de fond des plus agréables.

    medium_Bill_Audrey_Garage.3.jpgRECKLESS RECORDS GARAGE SALE 1997-2003 (Various artists – 2003) Ce disque est une parenthèse. Reckless Records est la compagnie discographique australienne de Bill et Audrey dont Bill Chambers est le boss. Ce dernier a eu l'excellente idée de rassembler 19 titres en une compilation: morceaux en solo ou en duo de Bill & Audrey, titres live, et duos d'Audrey avec Fred Eaglesmith ("Wilder Than Her"), Rick Carey ou Camille Te Nahu (Néo-Zélandaise émigrée en Australie et moitié du duo Camille & Stuie qu'elle forme avec son mari, le guitariste Stuart French). On trouve aussi une version de "Oh, Susannah" par un obscur groupe australien, The Yearlings, et un de Mary Gauthier. Ce disque est indispensable pour les amateurs des deux Aussies, pour les amoureux de country music, aussi. Les reprises de "I'm So Lonesome I Could Cry" (Hank Williams) ou "The Angels Rejoiced Last Night" (Louvin Brothers) sont à cet égard édifiantes.

     medium_Audrey_Texas.jpg

    TEXAS (Audrey Auld Mezera – 2005) Cet opus marque pour Audrey un double changement: elle s'est mariée à un américain (Mez Mezera, d'où sa nouvelle identité) et a émigré au U.S.A. Cet album a été enregistré au Texas avec des musiciens locaux (Bill Chambers est néanmoins venu dans la poche de la Kangouroute). Ce qui n'a pas changé, c'est la capacité d'Audrey à nous pondre une country music pleine d'une profonde sensiblité. Les sources d'inspiration ont évolué et plusieurs titres sont dédiés à des héros du genre (Woody Guthrie avec "Woody", Billy Joe Shaver avec "Billy Joe", Harlan Howard avec "Song For Harlan" et le Dead Ringer Band - le groupe de la famille Chambers avec Papa, Maman et les enfant Kasey et Nash -  avec "Shine") ou des personnes aimées (Papa Auld avec "My Father" et Mez Mezera pour "Missing Mez"). Mary Gauthier est encore une fois à l'honneur avec la reprise de "Karla Faye", titre consacré à la condamnée à mort Karla Faye Tucker, qui passa 14 ans dans le couloir de la mort avant d'être exécutée. La mort est encore présente avec "Hole in My Life", émouvant hommage à un amant défunt. Aux côtés d'Audrey (et Bill) plusieurs Texans de talent sont présents: le producteur et multi instrumentaliste Gabe Rhodes, la chanteuse Kimmie Rhodes (maman de Gabe), le violoniste Darcie Deaville et Carrie Rodriguez (violon et voix sur "One Eye")

    medium_Audrey_In_The_House.jpgIN THE HOUSE – Live in '05 (Audrey Auld Mezera & Nina Gerber – 2006) Quand une "singer-songwriter" relativement peu connue et une guitariste de talent se rencontrent, attend-on d'elles qu'elles enregistrent un double album en public dès leur second concert? Non! (Cela dit, après avoir vu et entendu ce que Mark Erelli peut faire avec Hayes Carll au bout de 3 jours, je suis moins affirmatif dans ma négation! Pas d'accord, Hervé?). Pourtant elles l'ont fait et auraient eu grand tort de se gêner car le disque est vivifiant et, malgré les nombreux passages parlés entre les morceaux (même si on eut aimé un peu plus de chansons et un peu moins de paroles), n'est jamais lassant. Audrey, si vous avez lu jusque-là, point n'est besoin pour moi de vous la présenter. Nina est, elle, une des meilleures guitarwomen du genre et s'est illustrée auprès de la regrettée Kate Wolf, de Nanci Griffith ou de Greg Brown. Ce concert, enregistré le soir du 3 décembre 2005 dans un petit théâtre-studio de Sebastopol (pas en Crimée, en Californie) fait partie de ceux dont on a envie de dire: "j'y étais". Et pour les absents, le disque est une bien jolie compensation. Le talent de Nina éclate au détour de chaque accord; quant à Audrey, dans des arrangements dépouillés (2 guitares et 1 voix), elle ne perd rien de ce qui a séduit l'auditeur en studio (ajoutant un vif sens de l'humour dans ses commentaires). Mieux même, cette configuration démontre si besoin était la consistance de ses compositions et démontre qu'Audrey est une véritable chanteuse folk, au sens noble du terme. Au chapitre des reprises, notons les habituels Fred Eaglesmith ("Alcohol & Pills") et Mary Gauthier ("Karla Faye"), mais aussi Johnny Cash et son "I Still Miss Someone" (avec "brother" Scott Gerber à la guitare), Patty Griffin pour "Mary", Diane Scanlon et "I Know You By Heart" et même une délicate (merci Nina) version instrumentale de "Imagine" de qui vous savez. Et quand on arrive à la fin de cette œuvre, on a du mal à croire que ces deux-là n'en sont qu'à leur deuxième show commun… Mais, je me repète, grâce à Mark, on sait que c'est possible sans tripatouillages ultérieurs en studio.

    medium_Lost_Men_Angry_Girls.jpgLOST MEN AND ANGRY GIRLS (Audrey Auld Mezera – 2006) Cette passionnante (au moins pour celui qui écrit) saga se termine avec "Lost Men And Angry Girls" paru en Australie à l'automne dernier (et en février 2007 aux States). Le premier titre, "Bolinas", évoque sa nouvelle résidence en Californie du Nord. Mais Audrey se considère néanmoins comme une étrangère et, à ce titre, n'hésite pas à faire usage de son œil extérieur pour stigmatiser la violence générée par sa patrie d'adoption au nom de la paix: "I know you're all fighting for peace", chante-t-elle, mais "There'd be peace if you just stopped fighting" ("Je sais que vous luttez pour la paix / Mais il y aurait la paix si vous arrêtiez simplement de vous battre"). Son amour de la country américaine est toujours évident, notamment dans "Looking For Luckenbach" clairement inspiré par le hit de Waylon Jennings "Luckenbach, Texas (Back to the Basics of Love)", avec Bill Chambers dans le rôle de Waylon ou "Clinch Mountain Prayer" qui évoque la Carter Family. Les difficultés du sud rural des U.S.A. inspirent également l'artiste dans "Down In A Hole" (à propos de la crise d'une petite ville minière, le héros mourant souffrant plus de la noirceur de son âme que de celle de ses poumons). La nostalgie de l'Australie natale a donné naissance à "Half A World Away" qui voisine avec des titres plus introspectifs ou plus légers comme le presque comique "Self-Helped Help Me". Parmi les invités: Bill Chambers (qui produit l'album), Nina Gerber, Karl Broadie et Raechel Lee. Et un titre qui n'est pas de sa plume, "Morphine", dont le texte est de… Bonnie Parker (Eh oui! Celle de Bonnie & Clyde.) sur la musique d'un air de 1930 "M.O.T.H.E.R.".

    En résumé, Audrey Auld Mezera est sans doute l'une des artistes les plus intéressantes de ce début de millénaire. Elle ne nous a sans doute pas encore tout livré, loin de là, et je suis sûr que son talent n'a pas fini de nous éclabousser.

    Un regret cependant, les disques de Reckless Records ne sont disponibles chez nous qu'en importation. Mais vous pouvez tous les trouver facilement et pour pas cher chez amazon (.fr ou .com) ou en téchargement chez iTunes ou eMusic (le second est moins cher que le premier, en MP3 et non en MP4, avec cependant un inconvénient c'est qu'il n'est accessible qu'avec un abonnement). Alors vite, à vos claviers, écoutez et commandez. Comme on ne dit pas chez Darty, "c'est satisfait ou satisfait" (ou alors vous vous êtes trompé de blog).

    PS: au cours de cette note, ont été citées d'autres artistes féminines de talent qui mériteraient qu'on les évoque plus longuement. Nina Gerber, Carrie Rodriguez (dont l'album "Seven Angels On A Bicycle" – quel titre – a été chroniqué dans "Crossraods") qui sera prochainement à La Pomme d'Ève, les excellentes Mary Gauthier et Patty Griffin, Kimmie Rhodes…

    Et puis il y a Fred J. Eaglesmith, mais sur lui, c'est un livre qu'il faudrait écrire, et je n'y suis pas encore prêt, alors visitez son site si vous avez envie de le connaître.

  • Eve's Apple, February 18, 2007 (part 2)

    Hayes & Mark croquent la Pomme 

    Voici donc où j'en étais ce dimanche (un vrai dimanche d'été sur Paris) vers 19H00. En fait, à 19H00, il faisait frisquet près de St Etienne du Mont et du Panthéon (à l'ombre duquel nous degustames une rapide collation).

    À vrai dire, ma curiosité m'avait, la veille, poussé à voir (et entendre) comment Hayes Carll sonnait sans orchestre. Et j'avais trouvé sur la toile un concert fort sympathique enregisté au Texas le 30 novembre dernier.

    (13 titres (Hayes seul à la guitare sur 8 d'entre eux et avec une discrète steel guitar pour les autres) parmi lesquels "I Don't Wanna Grow Up" de Tom Waits, "Worry B Gone" de Guy Clark, "Bill Morrissey Falls In Love At First Time" de Bill Morrissey, et puis bien sûr quelques compositions de Hayes dont le joyeux "Good Friends" ou le lancinant "Arkansas Blues".

    Ce que j'avais entendu me démontrait que les univers de Mark et Hayes avaient finalement beaucoup de convergences. Et ce que je vis (entendis) en arrivant à la Pomme un peu avant 19H00 le confirma. Personne en haut de l'escalier, mais le son de guitares (au pluriel) qui répétaient. Et Hervé monta pour l'accueil de ses invités et nous dit avec un grand sourire que les deux nouveaux compères allaient lui faciliter la tâche. Pas de problème de préséance, ils allaient chanter ensemble. Comment? C'était la surprise pour tout le monde.

    Au bas de l'escalier, se trouvent les toilettes, ce qui a son importance. En effet, attendant à la porte, j'en vis sortir un grand gaillard blond et barbu qui me salua gentiment. Et moi de lui répondre "Bonsoir Mister Carll". Regard surpris. Tiens, quelqu'un qui me connaît en France. Et moi: "I love your albums" (notez l'originalité de la réplique). Lui: "Oh! What's your name?". J'ai dû lui avouer que j'étais Français, la rencontre avec ses compatriotes serait pour plus tard. Puis vint dans le sens inverse un gaillard brun, aux cheveux plus longs, qui me dit, en Français "Bonjour". À quoi je repondis: "Bonsoir Monsieur Erelli" (toujours des répliques à la Audiard). Mais Mark ne sembla pas surpris que je le reconnaisse, il s'était déjà produit à la Pomme d'Ève en 2005 (à l'époque, je ne le connaissais pas encore). Ces deux garçons paraissaient en tout cas très simples et très sympathiques.

    Ce fut l'attente, un peu longue. Sur la scène, 2 chaises côte à côte, 2 guitares, 2 micros. Puis la salle se remplit peu à peu. Si l'on excepte Hervé, quelques piliers du club et nous, les francophones devaient se compter sur les doigts d'une main. Tant pis pour les autres, ils ont manqué un grand moment.

    Enfin, un peu après 20H30, ce fut l'introduction des 2 artistes, Hayes à gauche, Mark à droite. Ce dernier prit la parole en premier, et attaqua vite "Undone" extrait de "Hope & Other Casualties". À ce stade, deux constats: Hayes était à côté, attentif et se contentant de mimer des accords, et la guitare de Mark avait un son un peu bizarre (qui, si j'en crois Hervé, surprit même le preneur de son) – mais cela s'arrangea très vite. Le deuxième morceau fut pour Hayes (je ne l'ai pas identifié, et pour cause car il s'agit d'une nouvelle composition encore sans titre).

    medium_hayes-mark-05_small.jpgEt là, on comprit très vite que l'on passerait une grande soirée. D'abord parce que Hayes Carll, sur scène, confirme tous les espoirs qu'ont laissé naître ses disques. Et puis parce que Mark (qui mériterait le prix Nobel de la camaraderie) jouait sur ce morceau, comme il le fit pour les autres dans la soirée, le rôle d'un sideman du plus haut niveau. Pour ceux qui le connaissent un peu, ce n'est qu'un demi-suprise car c'est ainsi qu'il joue très régulièrement lorsqu'il tourne dans son pays natal. La soirée allait se dérouler ainsi, "in the round", i.e. chacun son tour.

    "Evening's Curtain", "Hey Baby Where You Been" puis Mark empoigna sa mandoline pour "Imaginary Wars" et la conserva pour accompagner Hayes sur "Bill Morrissey Falls In Love At First Time" de Bill Morrissey. Il y eut ensuite "Birches" et "Little Rock" (avec Mark à l'harmonica), un nouveau titre "Volunteers" que Mark annonça comme son prochain "MP3 of the month" (et un grand morceau dont le texte va sans doute faire plaisir à GWB).medium_mark-04_small.jpg

    Arriva la pause prise par les deux complices (on peut le dire) sur un morceau de Hayes "Wish I Hadn't Stayed So Long" (à ne pas prendre au premier degré, bien sûr). Dans la salle, au bar, ce fut un vrai moment de convivialité dans cette ambiance si particulière de la Pomme (sans tabac, ce serait encore mieux). La pause est aussi le moment pour les artistes de vendre quelques CD; Hayes l'annonça en faisant remarquer que contrairement à Mark, il n'en avait apporté qu'un ("Little Rock") et qu'il ne fallait pas oublier de l'acheter...

    Retour des désormais duettistes pour 4 titres chacun, toujours "in the round", un "Arkansas Blues" très Dylanesque répondant au percutant "Troubadour Blues".

    Puis ce fut le premier rappel ("Un titre chacun car nous n'avons pas eu le temps d'en apprendre un en commun"), et un second "encore" sur le même principe. Et la soirée s'acheva, pour Mark, sur "The Only Way" (titre post 11 septembre qui arracha les applaudissements des Américains présents) et, pour Hayes, sur "Rivertown" composé avec Guy Clark.

    Que dire de plus: que ce fut une grande soirée? Le mot est trop faible. Il y avait quelque chose d'exceptionnel dans ce concert. Deux types qui ne se connaissaient pas un semaine avant et qui s'entendent si bien sur scène, cela ne doit pas se produire tous les jours. Le mérite en revient principalement à Mark dont la "musicienneté" (© Quiet Man 2007) éclatait sur chaque morceau, qu'il seconde Carll à la guitare, à la mandoline, à l'harmonica ou aux harmonies vocales. Et l'on sentait la réelle admiration teintée de rconnaissance de Hayes qui comprenait bien la dimension supplémentaire apportée par Mark à des compositions qui en elles-mêmes volent déjà très haut.

    medium_hayes-01_small.jpgMais Hayes est de son côté un des plus grands talents à émerger du Texas, et bien au-delà, ces dernières années. Pour moi, il est déjà au niveau de John, Townes, Guy, Steve, Tom, Greg et les autres. Il ajoute en plus une certaine dose d'humour (mais il parle moins bien Anglais que Iain Matthews donc je n'ai pas tout compris) notamment lorsqu'il évoque l'architecture de la salle et dit que, s'il joue mal, il a peur d'être enfermé dans le donjon!

    Musicalement, les deux hommes se rejoignent sur de nombreux points et notamment en ce qui concerne les reprises. Ils ont la même admiration pour Bill Morrissey (qui va mieux, merci) dont ils ont interprété 3 titres. Hayes en est un fan depuis ses "college days" en Arkansas et Mark se souvient d'avoir reçu par la poste une cassette de Robert Earl Keen (Junior, a-t-il précisé), autre Texan, portant un T-Shirt à l'effigie de Bill. Et Mark a chanté "I'll Be Here In The Morning" du Texan Townes Van Zandt, un des "maîtres" de Hayes. Ils ont aussi des registres vocaux complémentaires et différents, ce qui a fait passer la soirée encore plus vite.

    Vous savez quoi? Ce fut une grande soirée de musique… Et, en prime, pour une fois, vous aurez droit à la liste des titres interprétés en ce dimanche soir, rien que pour vous faire regretter de n'avoir point été présents…

    Mark: "Undone" / Hayes: Nouvelle chanson, sans titre: "I hope you understand" (?) / Mark: "Evening's Curtain" / Hayes: "Hey Baby Where You Been" / Mark: "Imaginary Wars" avec  mandoline / Hayes: "Bill Morrissey Falls In Love At First Sight" (Bill Morrissey) avec Mark à la mandoline / Mark: "Birches" (Bill Morrissey) / Hayes: "Little Rock" avec Mark à l'harmonica / Mark: "Bend In The River" / Hayes: "Willing To Love Again" / Mark: "Volunteers" / Hayes: "Wish I Hadn't Stayed So Long".

    Break

    Mark: "River Road" / Hayes: "It's A Shame" / Mark: "Troubadour Blues" / Hayes: "Arkansas Blues" / Mark: "I'll Be Here In The Morning" (Townes Van Zandt) / Hayes: "Good Friends" / Mark: "Passing Through" / Hayes: "The Long Way Home"

    First Encore - Mark: "A Case Of You" (Joni Mitchell) / Hayes: "Live Free Or Die" (Bill Morrissey) avec SuperMark à la mandoline

    Second Encore - Mark: "The Only Way" / Hayes: "Rivertown"

  • La Pomme d'Ève, dimanche 18 février 2007 (première partie)

    Mark Erelli & Hayes Carll

     

    medium_AfficheErelliHayes2007.jpg

    10 jours après le passage de Iain Mathews, mous revoici dans le temple de la musique acoustique anglophone. Encore une soirée alléchante en perspective avec 2 artistes prometteurs de la nouvelle génération de la folk américaine. Ian (Iain) Matthews, je suis familier de sa musique depuis 35 ans.

    En revanche, Mark Erelli et (Joshua) Hayes Carll, je ne les connais respectivement que depuis juillet et août 2006. Ian, je l'avais découvert tout bêtement chez un disquaire après avoir lu des articles sur lui dans la presse musicale de l'époque. Sa reprise de "Woodstock" (de Joni Mitchell, que Crosby, Stills, Nash & Young avaient également interprétée) avait en effet été un grand succès de Matthews' Southern Comfort en Angleterre.

    Pour ses jeunes confrères, ce fut différent car désormais je fais mes emplettes musicales après avoir feuilleté le grand catalogue d'internet. Et de lien en lien, j'ai découvert tour à tour Jeffrey Foucault, Chris Smither, Mark Erelli et quelques autres, tous artistes d'une grande et même famille. Quant à Hayes Carll, j'avais aperçu son nom comme co-signataire d'un titre de Jack Ingram et, lorsqu'un lien à partir de Guy Clark me renvoya vers lui, j'eus envie de le connaître.

    Mark Erelli, né dans le Maine, j'en ai déjà parlé ici à 2 reprises: pour présenter ses 5 premiers albums dans une note intitulée "Aimons-les vivants", puis pour "Innocent When You Dream".

    Mais Mark Erelli, en plus d'être un guitariste, chanteur, auteur-compositeur de talent, est aussi quelqu'un qui aime faire partager son amour de la musique. Pour preuve, son site internet sur lequel il publie en début de chaque mois un "MP3 of the month". Plus de 60 titres ont déjà ainsi été mis en ligne depuis 2001 (on peut toujours les télécharger gratuitement) et, en plus de ses propres compositions dans des versions alternatives ou inédites, il reprend les auteurs qu'il aime, célèbres ou non. Ont déjà ainsi eu l'honneur d'une interprétation Markante: Jackson Browne, Doc Pomus & Mort Shuman, Nick Lowe, Bob Dylan, Bill Morrissey, Bruce Springsteen, Dave Carter, Chuck Berry, Cindy Walker, Roy Orbison, Gillian Welch & David Rawlings, John Hiatt, Townes Van Zandt, Joni Mitchell, Joni Cash, Patty Griffin, Jimmie Rodgers, Robbie Robertson, Hank Thompson, Ron Sexsmith, Marvin Gaye, Chris Smither, Willie Nelson, John Lennon & Paul McCartney, Hank Williams, Tom Waits, Richard Thompson, Neil Young, Bruce Cockburn…

    medium_Carll_Flowers.2.jpg

    Hayes Carll, lui, est Texan. Le Lone Star State a produit quelques uns des plus grands songwriters contemporains: Townes Van Zandt, Guy Clark, Steve Earle, Robert Earl Keen Jr. et bien d'autres encore. Disons-le tout de go, Hayes Carll appartient à cette noble confrérie. Quand on sait qu'il revendique en plus des influences telles que celle de Bob Dylan ou de John Prine, on sait qu'on a affaire à un sérieux client.

    Les 2 premiers albums de Mr. Carll le démontrent dès la première écoute. "Flowers And Liquor" (2002) contient 12 titres, pour la plupart enregistés avec un groupe, dont la reprise de "Live free or die" de Bill Morrissey. Certaines compositions le placent déjà au niveau de ses glorieux ainés: "Arkansas Blues", un des titres les plus dépouillés, vaut ce que Steve Earle a fait de mieux.

    La barre avait été placée haut après ce premier album mais"Little Rock" (2006) fait mieux que relever le défi. Il nous propose onze tites composés ou co-composés par Hayes Carll. En l'occurrence, il a pour camarades de jeu Ray Willie Hubbard (pour "Chickens") et Guy Clark (pour "Rivertown") venus co-composer un morceau avec lui. L'homme est aussi à l'aise dans les ballades que les morceaux plus enlevés; du blues au western swing, toute l'imagerie du songwriter texan est présente, et de belle manière!

    Et Hayes avait refusé l'offre d'un label qui lui proposait un contrat pour plusieurs albums préférant garder son indépendance artistique. Stetson bas, Mr. Carll.

    medium_Carll_Little_Rock.jpg

     

     

    La question que je me posais en arrivant était de savoir qui allait être la vedette de la soirée, entre ces artistes qui, de surcroît ne se connaissaient pas quelques jours avant. Une lecture attentive de Crossroads #51 (qui vient de paraître) m'avait en effet appris qu'ils n'étaient unis pour une mini-tournée européenne que pour des raisons commerciales, leurs disques étant distribués par le même label (Rounder Europe, qu'il faut citer) sur notre continent en ayant chacun seulement vaguement entendu parler de l'autre. Comment des artistes à la culture musicale a priori si différente (quoi que...) allaient-ils pouvoir cohabiter sans problème d'ego?

    Voici donc où j'en étais ce dimanche (un vrai dimanche d'été sur Paris) vers 19H00. La suite dans peu de temps…